Flexibilité choisie contre flexibilité subie

De nombreux discours associent toute flexibilité à un recul social.  Ce conservatisme est d’autant plus troublant qu’il s’oppose de plus en plus à la réalité du terrain où de la flexibilité est souhaitée par l’ensemble des acteurs socio-économiques, à commencer par les salariés eux-mêmes.  Il s’agit donc d’innover en matières de ressources humaines tout en conservant un cadre législatif commun, garant de la cohésion sociale.

En appliquant le principe de subsidiarité à la concertation sociale, il pourrait donc être intéressant de développer des projets pilotes de flexibilisation au niveau de certaines entreprises.  Mais plus encore, cette flexibilité ne pourra être pleinement choisie que dans le cadre d’une individualisation de l’approche, en permettant à chacun de définir son statut ainsi que les modalités quant à la contractualisation de sa collaboration avec un ou des donneurs d’ordre.

En cela, une tension se crée entre la culture Y – à qui l’on reproche un certain individualisme – et ceux qui persévèrent dans une approche strictement collective au sein d’un monde qui reconnaît, à juste titre, l’importance de la prise en considération et du respect de l’individu.  Cette dernière approche dépassée mène à une contradiction ainsi identifiée dès 1975 par Jean-François Kahn : "L'individualisme a tué l'individualité au profit d'un collectivisme camouflé."[1] 

Ainsi, la vieille garde des syndicalistes essaie de convaincre de l’importance d’une approche collective, tandis que la vieille garde des patrons regrette que les jeunes cadres-dirigeants puissent avoir d’autres centres d’intérêt que la vie de l’entreprise.  A ce constat, nous opposerons cette formule de John Stuart Mill : "Un peuple, semble-t-il, peut progresser pendant un certain temps, puis s'arrêter: quand s'arrête-t-il?  Quand il perd l'Individualité."[2]

Au combat d’arrière-garde des rapprochements de statuts, nous opposerons donc un véritable travail d’innovation où l’individu est responsabilisé quant au choix de son statut à la carte.  Dans le cadre d’un socle commun de cohésion sociale, l’individualité permettra une plus grande liberté pour chacun dans le monde du travail, base d’un véritable épanouissement professionnel au XXIème siècle.


[1] Jean-François Kahn, Chacun son tour, Stock, 1975, p. 48.
[2] John Stuart Mill, De la liberté, Gallimard (Folio), 1990, p. 170.

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